Hugo CHAVEZ | Habitat social

Barrios Caracas

Les détracteurs, les ennemis et les opposants de Hugo Chavez, président de la République Bolivarienne du Vénézuela, reconnaissent, avec amertume, que les réformes sociales engagées depuis son arrivée au pouvoir, en 1999, ont permis une formidable amélioration des secteurs de l'éducation et de la santé, félicitée par l’ONU, l’UNESCO et  l’Organisation Mondiale de la Santé. A l'inverse, l'habitat social n'a jamais été une des priorités du gouvernement Chavez, bien au contraire. Chavez emprunte ainsi, les mêmes chemins balisés par d'autres dirigeants marxistes ou sociaux-démocrates " radicaux ", pour qui le logement est considéré comme un élément de moindre importance, secondaire. 

« Le logement est un des grands échecs de ce gouvernement », constate l’historienne Margarita Lopez Maya, chercheuse à l’Université centrale du Venezuela. En 2011, selon la chambre vénézuélienne de la construction, « Il manque au moins deux millions de logements dans ce pays de 28,8 millions d’habitants », ce qui est considérable.



Petare, Caracas
Petare, Caracas

Le chaos urbain et la prolifération des barrios caractérisent la capitale vénézuélienne. Ces constructions spontanées se sont principalement développées dans les années 50, et ont explosé jusqu’aux années 80, suivant le boom des exportations de pétrole. Le gouvernement Chavez a ainsi hérité d'une situation dramatique, issue des gouvernements précédents utra-libéralistes, plus qu'il ne l'a créé. Cela étant, les sinistrés de la tragédie de Vargas, un glissement de terrain qui avait fait plus de 20 000 morts en 1999, n'étaient toujours pas relogés en 2011. Les mal-logés de Caracas investissent les buildings de bureau pour y trouver refuge et survivre [voir notre article] ou s'entassent dans les favellas des collines environnantes depuis des décennies. 




Les bidonvilles et les situations de mal-logement subsistent mais leur croissance stagne. Au début de la décennie 2000, les autorités entreprennent une politique de grands travaux avec la construction massive d'habitations destinées aux couches populaires. Des habitations à caractère sociale mais mises en vente et non destinées à la location, le gouvernement subventionnant l’acquisition pour les couches les plus modestes. Des lois ont également été adoptées pour limiter les taux d’intérêts et éviter les situations d’endettement. 

En décembre 2001, Chavez promulguait sa loi agraire qui jetait les bases d’une profonde réforme. Cette loi et les progrès matériels directs réalisés les premières années de gouvernance ont incité les habitants des bidonvilles à soutenir en masse la révolution bolivarienne. Ils s’organisent et participent aux initiatives des comités de quartier. Chaque conseil de quartier possède sa propre dynamique. Les membres du comité établissent une sorte de registre de la population et un porte-parole du comité est élu. Le comité peut alors être légalement enregistré et recevoir des subsides. Mais une forme d’organisation plus vaste s’imposait et  une nouvelle loi votée début 2006, institutionnalise les Consejos Communales. Le gouvernement  soutient financièrement ces comités [près de 4 milliards d’euros en 2007]. Grâce à ces fonds, il peut mettre sur pied des projets dans divers domaines comme l’enseignement, l’aménagement de routes, les soins de santé, l’agriculture ou le logement. Les porte-parole sont réélus à intervalles réguliers. Ils sont « la voix du quartier» mais ne décident rien, cette compétence revient à l’assemblée des habitants. La plupart des participants soutiennent le président Chavez, mais ses opposants y participent également. Selon les estimations 21 000 comités de quartier seront actifs en 2008. Hugo Chavez a en outre proposé d’également développer ces comités dans les usines et les campagnes. Les  Consejos Comunales  (Conseils Communaux) ont donc deux nouveaux petits frères, à savoir les Consejos de Trabajadores auprès des travailleurs et les  Consejos de Campesinos  auprès des paysans. Le Parti communiste du Venezuela (PCV) a joué un rôle important dans la préparation de la proposition de loi qui octroie aux comités de travailleurs une base légale. Leur rôle le plus important sera de permettre aux travailleurs de participer à la direction de l’entreprise et surveiller le fonctionnement du syndicat, tant dans les entreprises publiques que privées.

En février 2002, le gouvernement instaurait dans le cadre de cette loi les Comités de terres urbaines (CTU). Ainsi, les pauvres qui pour la plupart avaient construit illégalement une cabane dans un bidonville se voyaient offrir une chance de régulariser leur bien en prouvant qu’ils l’avaient construite eux-mêmes. Ils devenaient donc propriétaires légaux d’une habitation. Ce système très simple a donné lieu à une mobilisation énorme. Fin 2005, il existait près de 5 000 CTU dans tout le pays, soit 5,7 millions de gens organisés au total. Outre les assemblées des comités locaux, des assemblées sont également prévues au niveau régional, réunissant de 10 à 20 CTU et sur l’ensemble du territoire urbain. Les thèmes les plus souvent abordés concernent l’enseignement, l’aménagement de routes, la culture et les problèmes sociaux dans le quartier. 

D'autres mesures complètent le système. Telle la Mission Madres del Barrio (Mères du quartier) créée pour lutter contre la consommation de drogue, l’absentéisme scolaire, la grossesse précoce et afin de recenser les mères de famille en grande difficulté. Pour cette mission sociale, les femmes jouent un rôle fondamental au niveau préventif et éducatif. Des comités dirigés par les mères de famille ont été établis dans chaque quartier, et intègrent désormais les conseils communaux. Les mères au foyer à faible revenu reçoivent désormais un pécule équivalent à 80% du salaire minimum. Près de 200 000 d’entre elles bénéficient de cette aide gouvernementale ; aide qui peut être temporaire ou permanente selon les cas.





En 2008, le gouvernement nationalise le secteur cimentier, en accusant les cimentiers privés d'exporter leur production au lieu de la vendre sur le marché intérieur pour faire face à la pénurie de logements. Une décision qui a étonné les professionnels du bâtiment et les économistes spécialistes de l'Amérique latine, pro ou anti Chavez. « Le ciment n'est pas une ressource stratégique, ou alors le bois et le sable le sont aussi », ironise Luis Miotti, économiste, enseignant à Paris Nord et chercheur associé à l'Institut français des relations internationales (Ifri) : « Cette fois-ci, je ne vois pas la logique économique d'une privatisation des cimenteries. » car contrairement au pétrole, véritable moteur de ce pays, le ciment est loin de porter de tels enjeux. D'autres évoquent l'intention d'ôter des mains du privé, le secteur de la construction.



Toutes les nationalisations portent un énorme préjudice au secteur de la construction privée, les promoteurs, par peur de voir leur société, leurs biens immobiliers et leurs terrains réquisitionnés ou nationalisés refusent d'investir dans de grandes opérations. Dont la première conséquence directe est la permanence de la crise du logement et l'augmentation des loyers, et ce, tout au long des années 2000.





Il faut attendre les inondations de Caracas en 2010, pour qu'enfin le président lance une campagne en faveur des mal-logés : notamment pour les quelques 130.000 sinistrés des pluies diluviennes qui ont fait 38 morts. La première mesure concrète du président (29 novembre 2010) est d'inviter 25 familles sans-abris dans son palais présidentiel du centre de Caracas : « J'ai 3 grands bureaux. Nous allons transformer le 2ème en plusieurs appartements. Quand à la grande cuisine, nous pouvons y loger environ 20 familles.» Promesse est faite de reloger l'ensemble des familles touchées. Mais les pluies torrentielles continuent de s'abattre pendant des semaines à Caracas et d'autres provinces et la situation prend une tournure dramatique. Une autre déclaration de Hugo Chavez est adressée aux hôteliers privés, les contraignant à héberger les dizaines de milliers de victimes [90,000] qui ont été chassés de leur résidence par les inondations et les glissements de terrain. Il s’en est pris à l’opposition et aux Vénézuéliens mieux nantis et a fustigé les gens issus des classes aisées, qui auraient dû selon lui planter des tentes pour les victimes «sur leurs terrains de golf».

Une des premières annonces faite par Hugo Chavez après la catastrophe (26 janvier 2011) est son intention de nationaliser la banque hispano-vénézuélienne BBVA-Provincial, qui a enfreint la Constitution en refusant d’accorder des prêts immobiliers à des citoyens mal-logés. Après avoir entendu les plaintes de mal logés lui assurant que les responsables du Provincial n’avaient pas voulu les recevoir quand ils ont sollicité une aide financière, Chavez a appelé en direct télévisuel le président de la banque, Pedro Rodriguez Serrano, pour lui demander des explications. Celui-ci a répondu que "sa banque n’était pas à vendre", face à quoi le président a rappelé que la banque n’était pas au-dessus des lois et devait répondre aux demandes de prêts effectuées par les citoyens. « Si la Banque Provinciale refuse de respecter la Constitution et les décrets présidentiels, je vais nationaliser la banque. Je n’ai aucun problème à le faire. Je paierai ce qu’elle vaut », a assuré le président vénézuélien devant des habitants réclamant des logements. Menace prise très au sérieux car peu après ses déclarations, la BBVA-Provincial assura au président son « engagement en faveur du financement de logements pour les familles vénézuéliennes" et son "attachement total au respect des lois" du pays », et promis de chercher « des alternatives satisfaisantes pour toutes les personnes concernées » avec des représentants du gouvernement et des familles plaignantes. Chavez s’en est félicité avant de préciser que le Venezuela avait besoin de crédits pour le logement et comptait sur la banque privée pour en financer la moitié.

Le 17 décembre 2010, les députés du Parti Socialiste Unifié du Venezuela (PSUV) votent une nouvelle loi d’habilitation qui permet à Hugo Chavez de prendre des mesures rapides, par décret, au cours des 18 prochains mois. Le Président du Venezuela pourra légiférer dans les domaines suivants : infrastructure, transports, services publics, logement, finances, fiscalité, utilisation des terres urbaines et rurales, sécurité civile, défense nationale, coopération internationale et « système socio-économique ».

L’un des objectifs de cette loi est de répondre à l’urgence sociale provoquée par les récentes inondations, qui ont laissé plus de 100 000 Vénézuéliens sans logement. Mais Chavez a clairement expliqué que son objectif dépasse la nécessité de répondre aux besoins immédiats des victimes de cette catastrophe naturelle. Dans son billet hebdomadaire, Las líneas de Chávez, le Président explique : « Il ne s’agit pas seulement de faire face aux conséquences des inondations. Il s’agit aussi de répondre à certains problèmes structurels, inhérents au modèle capitaliste, qui ont aggravé la crise actuelle. » (Últimas Noticias, le 19 décembre 2010). L’oligarchie vénézuélienne a réagi avec vigueur. Le journal d’opposition Tal Cual titre en une « Vers une dictature ». El Universal compare Chavez à Hitler et Mussolini, tandis que l’agence Reuters affirme que « les banquiers et propriétaires se préparent à subir une nouvelle vague de nationalisations ».

Selon un auteur du site TMI [Tendance Marxiste Internationale] : « La classe capitaliste craint de perdre ses propriétés et les privilèges qui vont avec. Cette crainte est fondée. Chavez a déjà pris des mesures contre les spéculateurs dans le secteur du logement, en nationalisant des entreprises de construction qui escroquaient des gens. Chavez a également pris des mesures contre 47 propriétaires terriens qui possédaient d’immenses terres dans le sud-ouest du pays. Cela fait partie d’une nouvelle offensive de la Réforme Agraire, qui jusqu’alors n’a redistribué que 3 millions d’hectares, sachant que dans la plupart des cas il s’agissait d’une reconnaissance formelle de rapports de propriété existant. Les organisations paysannes, dont le Front Ezequiel Zamora, ont demandé une accélération de la lutte contre les latifundia, dans le but de réduire la dépendance du Venezuela à l’égard des importations de nourriture. Ces nouvelles expropriations ont rencontré la résistance des propriétaires terriens, qui ont notamment organisé des barrages dans le village de Santa Barbara. Ces actions sont soutenues par des dirigeants de l’opposition tels que le député Abelardo Díaz, qui a appelé les manifestants à bloquer l’autoroute pan-américaine, afin « d’envoyer un message au Président ». Hermann Escarrá – une autre figure de l’opposition – a appelé à une « grève illimitée » et à descendre dans la rue pour « manifester une résistance civile et militaire ». Le député Miguel Ángel Rodríguez en appelle à un « soulèvement populaire » contre les nouvelles expropriations. A ce jour, il n’y a eu que des accrochages mineurs entre les propriétaires terriens et les soldats que le gouvernement a envoyés pour protéger les terres expropriées. Mais on peut s’attendre à de nouveaux actes de sabotage et de violence, comme ce fut le cas lors des expropriations de 2003. L’opposition a appelé à une nouvelle marche pour « défendre la propriété privée », le 23 janvier 2011. Elle fera tout pour rallier les forces de la réaction et créer une situation de chaos et d’insécurité, à tous les niveaux de la société. Le nouveau Parlement se réunira le 5 janvier. La contre-révolution, qui y détient environ 40% des sièges, combinera probablement les actions parlementaires, légales, avec une agitation extra-parlementaire et violente. Chavez a également décrété l’expropriation de Sanitarios Maracay et Alven, deux usines de l’Etat d’Aragua. C’est une victoire pour les travailleurs. Les ouvriers de Sanitarios Maracay avaient occupé l’usine dès 2006, lors d’un conflit avec l’employeur sur des questions de santé et de sécurité. Face au sabotage patronal, ils ont commencé à produire sous contrôle ouvrier et ont demandé l’expropriation de l’usine. Chavez a expliqué que les usines d’Alven et de Sanitarios Maracay ont été ruinées par le capitalisme et qu’elles devraient être réactivées et intégrées au plan d’urgence de construction de logements (Sanitarios Maracay produit des sanitaires et Alven des portes et des fenêtres). Les entreprises Sidor et Sidetur (poutres et barres d’acier), l’industrie du ciment et l’entreprise Inaf (matériaux de plomberie) ont déjà été nationalisés.» 


En février 2011, le président Chavez annonce un nouveau programme gouvernemental qui prévoit la construction de deux millions de logements dans les sept ans à venir, baptisé la mission d'habitation du Venezuela. Le gouvernement a prévu d’investir 60 milliards de bolivares (12 milliards de francs) pour construire environ 350.000 logements entre 2011 et 2012, notamment grâce à des accords «pétrole contre maisons» avec la Chine ou l’Iran. Signe de la très forte demande, en moins d’un mois 860.000 familles déposent une demande de logement. [Lire notre article].

A un an et demi des élections présidentielles au Venezuela, l’envolée des cours du pétrole, au-delà des 110 dollars le baril, assure au chef d'État une prospérité bienvenue, lui permettant d'organiser sa Grande Mission pour l'habitat populaire.


Ainsi, le président Chavez confirme, à nouveau, la désaffection des politiques marxistes à considérer la ville, et le lieu de l'habitat, pour ne pas dire le Droit au logement pour tous, comme une valeur aussi importante que l'éducation ou la santé. Hugo Chavez rejoint ainsi la longue liste des dirigeants marxistes n'accordant que peu d'intérêt à un problème cruellement vécu par les populations les plus pauvres, comme ce fut le cas pour Fidel Castro, etc., etc. Hugo Chavez est ainsi souvent critiqué pour ne pas avoir résolu le problème du logement en 11 années de pouvoir, et ce, malgré une relative stabilité sinon prospérité économique. La seconde critique est plus difficile a cerner car elle concerne la qualité des nouvelles constructions et au-delà de l'urbanité des nouveaux quartiers. Nous avons que trop peu de témoignages mais il semble bien, que la qualité architecturale soit parfaitement insipide, totalement absente au nom de la sempiternelle question de l'économie du projet. Ce qui évoque les mêmes erreurs urbaines produites après la seconde guerre mondiale, en France, en Europe et dans les pays de l'alliance soviétique, lorsqu'il fallut re-construire les villes et les développer. Les mêmes erreurs qui se sont produites, pour d'autres raisons, en Chine et au Vietnam suite à la libéralisation de leur économie. Ce qui est d'autant plus étonnant que l'Amérique du Sud dispose dans certains pays [Argentine, Brésil, Chili] d'excellentes écoles d'architecture, centres de recherches et de praticiens. Ce qui laisse présager un avenir immédiat répondant aux attentes des vénézueliens et un long terme plus sombre, présentant les pires difficultés. 


Cuidad de Caribia Vénézuela 2011 : en chantier


Cuidad de Caribia Vénézuela 2011
Cuidad de Caribia Vénézuela : les premiers habitants, avril 2011



Pour terminer, nous présentons un article d'un partisan de Chavez concernant ces questions, daté de juin 2011. Qui n'explique pas pourquoi  le gouvernement Chavez a attendu autant d'années avant d'intervenir.  Pour ce qui concerne l'insécurité dans les villes du Vénézuela, lire l'article de Maurice Lemoine paru dans Le Monde Diplomatique


LE LOGEMENT AU VENEZUELA : droit ou marchandise ?

Jesse CHACON 

La vaste Mission Logement Venezuela récemment lancée par le gouvernement bolivarien, a suscité des réactions abondantes et divergentes dans la population. Alors que des centaines de milliers de citoyen(ne)s se sont rendus massivement aux points d’inscription sur les places publiques, réaffirmant leur participation à cette mission, la droite vénézuélienne parie sur l’échec de cette initiative de politique sociale du gouvernement.


Parmi ses arguments, il y a “l’inviabilité” de cette mission. C’est le même argument qu’elle a utilisé il y a une décennie contre les objectifs ambitieux de réduire la pauvreté, de garantir la santé et l’éducation que proposait le premier plan de développement de la nation. Ceux-ci sont aujourd’hui des réalités palpables, validées non seulement par le peuple vénézuélien comme principal bénéficiaire mais aussi par les organismes internationaux de référence et par le cadre normatif dans la protection de ces droits formé par l’ONU, l’UNESCO, l’Organisation Mondiale de la Santé, entre autres.

Aujourd’hui, malgré le rejet de ces politiques par l’opposition, la population opte avec enthousiasme et espoir pour une stratégie qui renoue avec l’obligation politique et morale d’un état qui construit des garanties et prend sur lui la grande dette sociale que l’élite bourgeosie a toujours invisibilisée.



Le rêve social et cette espérance se reflètent dans notre enquête de mai 2011. 74.3 % des vénézuéliens considèrent que cette mission contribuera à la solution du problème du logement. Ce chiffre monte à mesure qu’on descend dans les classes sociales. Les chiffres vont de 78.4 % dans la classe D, à 76.9 % dans la classe E. La “mission logement” reçoit son plus grand appui parmi les jeunes avec un taux de 79,9 %.
De la même manière 63.5 % de la population croit que le gouvernement respectera ses engagements de construire ces logements. Ces fortes attentes sont plus grandes dans la classe D (65,5 %), la classe E (70,1 %) et la jeunesse (66,9 %).

Question : pourquoi l’opposition vénuézélienne commet-elle de nouveau l’erreur d’affronter une politique qui approfondit la qualité de vie de la population ?

Nous croyons que trois éléments expliquent cette réaction :

1. - La culture égalitaire va contre la logique culturelle de la distinction bourgeoise. L’opposition est l’expression politique de cette élite qui pendant 50 ans au gouvernement a fait preuve d’avarice, accaparant la rente pétrolère alors que les exclus ne trouvaient pas d’espace dans la ville. Cette élite n’a pas construit un tissu industriel capable d’absorber l’immense vague de migrants ruraux et n’a pas permis une appropriation ordonnée des espaces urbains par cette population émigrée. La construction sociale de l’espace a été le produit de la lutte des habitants, qui a tourné à leur désavantage en les repoussant dans les cordons de quartiers populaires et les a obligés á développer des processus d’urbanisation en zone inapte et avec des matériels inadéquats.
La bourgeoisie a joui culturellement de cette ségrégation et de cette différenciation car la distinction spatiale a élevé son status comme élite. C’est comme cela qu’ont surgi les “hauteurs” pour les pauvres et les “collines” pour les riches. Ce fut sans aucun doute une inversion morale propre du capitalisme : se sentir bien quand on est différent et qu’on a plus, tandis que d’autres n’ont rien.

2. - L’inexistence dans le camp de l’opposition, d’un programme alternatif politique et social différent de la recette néo-libérale qui a été rejetée par la mobilisation sociale de 1989, la mobilisation militaire de 1992 et par la mobilisation électorale de 1998. Faute de programme, l’opposition n’a pu que parier sur l’échec du processus bolivarien comme possibilité de prendre le pouvoir pour des secteurs méprisés et politiquement exclus. A chaque fois cette stratégie s’est révélée désastreuse pour eux car les bases populaires ont trouvé dans la proposition bolivarienne la dignité historique qui leur a toujours été refusée.

3. - La politique de création de garanties face au problème du logement qu’assume le gouvernement bolivarien, déstructure le logement comme marchandise, comme valeur d’échange et lui rend le statut de valeur d’usage lié à “l’être” plus qu’à “l’avoir”. En définitive, on brise la logique capitaliste du logement comme marchandise qui génère un excédent financier. On transforme le logement en un droit véritablement réalisable et réalisé, un droit qui va au-delà du formalisme annoncé dans la constitution et dans la déclaration de Vancouver, signée par l’Etat vénézuélien pour garantir le logement comme droit.

On connaît bien la phrase “le droit au logement ne peut être réalisé que dans le socialisme”, phrase qui a été vue comme un simple slogan de l’orthodoxie marxiste ; cependant on constate dans la réalité sociale que la bourgeoisie immobilière est par nature une bourgeoisie profondément financière, qui ne voit pas le logement comme une nécessité sociale mais comme un négoce hautement lucratif.

Sa voracité n’a pas seulement converti le logement en un bien positionnable sur le marché afin d’augmenter ses bénéfices, mais l’a conditionné à des offres sophistiquées qui ont engendré des pratiques usurières. La bourgeoisie a offert des crédits basées sur des formules d’intérêt mixte, sur des crédits indexés qui ont pillé les poches des vénézuéliens. C’est dans la nouvelle société qui se construit sur la base de critères socialistes que sont démontées ces pratiques d’usure, et qu’on a réussi à protéger des milliers de débiteurs.

Ensuite les entreprises financières et immobilières ont forcé des milliers de familles à subir l’escroquerie des préventes, des ventes sur plans jamais concrétisés, jamais remis. De nouveau c’est la révolution qui fut appelée à démanteler ces escroqueries et à protéger les victimes.

Toute cette impulsion politique qui situe le logement sur le plan du droit social, en lui retirant son signe mercantile, va requérir un haut niveau d’efficacité dans l’exécution des politiques du Gouvernement Bolivarien.
Le succès de cette mission consolidera la connection du peuple vénézuélien avec un processus qui l’a sorti des oubliettes auxquelles l’ont jeté 50 ans de farce démocratique. Son échec engendrera un climat de frustration qui éloigne les plus nécessiteux de leur unique voie vers le paradis : la révolution !

Aujourd’hui plus que jamais nous avons besoin de l’efficacité révolutionnaire.




Jesse CHACON 

Directeur de la Fondation GISXXI

Traduction (FR) : Thierry Deronne, 

www.larevolucionvive.org.ve





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