Le Grand Magasin
Paris
1836 - 1936
Ne laissons donc pas les économistes prétendre que le fonctionnement des Grands Magasins est démocratique, qu'il sert les intérêts du plus grand nombre, qu'il joue le rôle bienfaisant de la machiné à vapeur dans l'industrie en augmentant la production et en diminuant les frais généraux, bref qu'il fait les affaires de la masse contre une minorité d'intermédiaires parasites.
Brochure d'une ligue syndicale | 1892
Brochure d'une ligue syndicale | 1892
Mettre à la portée du plus grand nombre, le maximum de marchandises, dans un même espace couvert et protégé.
Telle est la Loi première du Grand Magasin, aucune autre ne peut la supplanter, et elle l'emporte sur toutes les autres considérations. La simplicité de la formule ne doit pas occulter la complexité des mécanismes commerciaux, de gestion, et de marketing. Ces premiers discounter de l'ère industrielle ont été ce qu'étaient les hypermarchés des périphéries de l'ère post-moderne. S'adaptant parfaitement aux nouveaux produits de la révolution industrielle, le grand magasin a plus que favorisé l'émergence d'une culture de la consommation, et il est une préfiguration de la consommation de masse, résumée, avec originalité, par R. Sennett :
« Des objets de qualité moyenne vendus à des prix autrefois réservés aux objets de médiocre qualité, des consommateurs dépensant davantage pour posséder davantage : voilà à quoi visait la “standardisation” des biens matériels. Les négociants de l’époque savaient que pousser les gens à acheter cette nouvelle classe d’articles constituait un réel problème. Ils tentèrent de résoudre ce problème en créant une sorte de spectacle dans le magasin, spectacle qui doterait les articles, par voie d’association, d’une valeur et d’un intérêt dont ils étaient intrinsèquement dépourvus.»
Les faillites seront nombreuses, mais les rigoureux, les inventifs, feront fortune considérable [1] : Jean Jaurès déclarait que cela « prouve combien est défectueux un mécanisme qui peut ainsi accumuler aux mains d’une seule personne une fortune inouïe... », et ce, au détriment des commerces traditionnels, des fournisseurs, de l'industrie française, des ouvriers, des employés et du consommateur. Et il est remarquable de constater que les critiques d'hier, de plus d'un siècle, peuvent s'appliquer sans peine aux groupes de la grande distribution d'aujourd'hui.
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