Carte postale propagande Sonacotra | 1970s
SONACOTRA
l'APARTHEID en France
LUTTE des FOYERS [1974 - 1980]
Prétendre
qu'il existe des populations aux caractéristiques telles qu'il est
nécessaire de construire pour elles des logements spécifiques c'est
poser que ces caractéristiques sont données et qu'elles isolent et
distinguent définitivement ces catégories du reste de la
population. […]
Ainsi
le thème d'une « nature » particulière supposée
rejoint les thèmes principaux de l'idéologie raciste.
Mireille
GINESY-GALANO | 1984
Banalisée par le temps, acceptée de fait par les partis politiques, les
syndicats et la société française, un quasi consensus normait la mise à l'écart du prolétariat immigré célibataire – une
spécificité française, le foyer d'immigrés-isolés n'existe dans aucun pays européen
proche de la France [1]. Il était normal que les immigrés
vivent là. La longue lutte des résidents des foyers-hôtels
Sonacotra débute en 1974 pour se terminer en 1980. Au plus fort de
la lutte, 130 foyers se déclarent en « grève », soit
30.000 résidents immigrés exigeant des conditions de vie plus
décentes et plus dignes humainement.
La
première grande lutte d'ampleur en France de grève des loyers –
et la dernière -, d'une étonnante longévité, ayant réussi le
double pari improbable de solidariser 27 nationalités qui auparavant
au mieux s'ignoraient, au pire s'opposaient, et dans le même
mouvement, de fédérer nombre de foyers-hôtels. Monique HERVO
considérait que cette lutte était à l'avant-garde, « très
en avant par rapport aux luttes urbaines françaises. » Mais
cette lutte fut aussi celle des associations citoyennes, pour la
défense des immigrés, souvent créées depuis peu, interpellées
et réactives : un élan de générosité, de dévouement de leurs militants
anonymes qui soutenaient solidairement et bénévolement les grévistes en leur offrant leur temps et leurs
compétences (avocats, juristes, magistrats, médecins, cinéastes,
artistes et architectes). Elle fût celle des organisations
politiques de l'extrême gauche, qui ont initiées le mouvement et
apportées un soutien sans faille. Il s'agit de la première
grande mobilisation politique anti-raciste franco-immigrée.
Une
lutte qui a au final été une défaite, mais qui a remis en question
le programme résidentiel néo-colonialiste, ségrégatif dit-on
aujourd'hui, de la Sonacotra, de l'Etat, l'institutionnalisation de
la séparation forcée, la mise à l'écart de la vie sociale des
travailleurs immigrés célibataires.