Photo : Ian Rance
PRIPYAT
était une ville nouvelle de 49.000 habitants, située à 2 km de la
centrale nucléaire de Tchernobyl, construite en 1970 pour héberger les
employés de la centrale. Pripyat était alors considérée comme une
« ville modèle » de l'architecture soviétique, possédant des
logements de bonne qualité et une multitude d'équipements : jardins publics, installations
sportives, cinémas, théâtres, etc.
Lors du tragique accident survenu en avril 1986, les habitants non informés du danger observèrent les
évènements depuis le toit des immeubles ; ils seront évacués seulement quelques jours après la catastrophe, et ne reviendront plus. Le rapport de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), présentant une synthèse des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl, note que dans la semaine qui a suivi l’accident, les autorités soviétiques ont procédé à l’évacuation, et « entre le 27 avril et le 7 mai, deux villes et soixante-dix localités, situées dans un rayon de 30 kilomètres autour de la centrale, furent vidées de leurs habitants. Cette zone d'exclusion couvre une superficie de près de 300 000 hectares, à cheval sur les territoires ukrainien et biélorusse. (...) Au total, environ 250 000 personnes quittèrent leurs foyers ». Outre la zone d’exclusion, trois autres zones ont été déclarées par la suite dangereuses mais l’évacuation n’a pas été obligatoire.
Selon l'IRSN « Des surfaces importantes de trois territoires de l’Ukraine, de la Biélorussie et de la Russie (correspondant à plus de sept millions d’habitants) ont présenté des dépôts de césium 137 supérieurs à 37 kBq/m2 :
- la région comprise dans un cercle approximatif de 100 km de rayon autour de la centrale,
- la région de Gomel, de Moguilev et de Briansk à environ 200 km au nord-nord-est,
- la région de Kalouga, Toula et Orel à 500 km au nord-est. »
Ainsi, 188 villes et villages ont été évacués, certains ont été rasés, la plupart ont été abandonnés. Depuis,
la nature a repris ses droits et dévore la ville de Pripyat, s'attaque au bitume et aux murs de béton de la cité interdite. Les animaux sauvages et contaminés y viennent trouver refuge. Les
ingénieurs estiment que les éléments radioactifs les plus
dangereux devraient atteindre leur demi-vie dans 900 ans et qu'il
faudrait théoriquement 48.000 années pour que la radioactivité
s'épuise totalement. Des estimations cependant contestées.
Outre l'évacuation de la zone d'exclusion nucléaire qui a constitué un traumatisme majeur pour les populations, le sort des samosioli est également à mentionner : Samosioli (ou « colons individuels » en français) est le nom donné aux personnes revenues vivre dans la zone d'exclusion malgré les interdictions, et qui y vivent en autarcie de leur lopin de terre.
D'autre part, un trafic s'est développé : il concerne des objets et mobiliers laissés à l'abandon (parfois fortement contaminés), le bois de chauffage abattu illégalement et le braconnage des animaux qui ont proliféré depuis l'évacuation de la zone.Enfin, des agences de tourisme spécialisées dans la visite du site attirent des « touristes nucléaires » venus du monde entier. Une équipe d'architectes, zaarchitects.com, a même développé un projet pour la mise en valeur de la zone de Tchernobyl, par la création d'infrastructures de tourisme. Les concepteurs estiment que le développement massif du tourisme, comprenant des activités de "safari-photo", peut être un moyen de survie économique pour cette zone sinistrée économiquement.
Tout ceci n'a guère d'incidence sur nombre de gouvernements de par le monde, et notamment en Europe. Ainsi, tandis que la France construit son 59 réacteur nucléaire, les
gouvernements belge et espagnol préparent l'allongement de la durée
de vie de leur parc nucléaire. Le gouvernement belge a validé en conseil des ministres une proposition de prolongation de dix ans du fonctionnement de l'un des sept réacteurs du pays. "Le gouvernement choisit la clarté et la sécurité", a expliqué Elio Di Rupo, le Premier ministre socialiste. Concrètement,
le nouveau plan, prolonge de dix ans le fonctionnement de l'un des
trois réacteurs de la centrale de Tihange (Wallonie). La durée de
vie de cette unité, mise en service en 1975, est portée à 50 ans.
La fermeture en 2015 de deux réacteurs de Doel (Flandre), ouverts
eux aussi en 1975, est maintenue, tout comme l'arrêt entre 2022 et
2025 des quatre autres réacteurs (deux unités supplémentaires à
Doel et deux autres à Tihange), mis en service entre 1982 et 1985.
Des centrales nucléaires situées dans des zones urbaines les plus peuplées de la planète, et l'on imagine avec effroi, quelles seraient les conséquences sinon d'une catastrophe mais d'un simple incident. Dans quelle mesure il serait possible d'évacuer le plus rapidement possible un aussi grand nombre d'habitants, et vers quelle destination....
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire