ITALIE : Luttes Urbaines : 1976 / 1978

Imaginez une alliance politique entre Valéry Giscard d'Estaing et Georges Marchais, entre Nicolas Sarkozy et Jean-Luc Mélenchon ; C'est pourtant ce qui arriva en Italie en 1976, une incroyable entente contre-nature entre le Parti communiste et la Démocratie-chrétienne. Un des évènements parmi d'autres qui sera à l'origine de ce qui est considéré comme le second mai 68 italien : les grandes grèves de 1977, le Mouvement de 77.
A. Cavazzini explique la dissolution du Parti communiste italien -après une lente agonie en 1991- par sa collaboration totale avec les partis politiques de la Droite et du Centre, les forces les plus rétrogrades du pays :

Vers la moitié des années 1970, le Parti accélèrera les démarches de sa « candidature » à gouverner la crise sociale et économique, qui apparemment échappait au pouvoir de maintenir l’ordre de la part des forces politiques bourgeoises. Le succès électoral du juin 1975 – largement redevable des espoirs en une traduction politique des instances des luttes – poussa le PCI à franchir une étape décisive en direction d’une alliance avec les classes dominantes.
En 1976, le PCI entame sa politique de « solidarité nationale », c’est-à-dire, d’abstention « constructive » (donc de soutien larvé) vis-à-vis des gouvernements démo-chrétiens au nom d’une collaboration nécessaire à « sortir de la crise » ; les décrets et les lois économiques approuvés avec le consensus du Parti Communiste déchaînèrent une offensive capitaliste brutale contre les acquis normatifs et salariaux issus des luttes des années précédentes. Au fur et à mesure que le PCI était légitimé à pénétrer la sphère étatique et gouvernementale, il devint l’instrument, conscient et volontaire, d’une stratégie visant à faire reculer les positions des mouvements des années précédentes, en déchargeant sur les classes travailleuses, les ouvriers, les techniciens et les couches moyennes, les effets de la crise (« l’usage capitaliste de la crise » comme stratégie contre-révolutionnaire, pour reprendre le langage opéraïste). Lorsque la crise frappera surtout les jeunes générations, en produisant des couches sociales appauvries de plus en plus nombreuses et structurellement destinées à la précarité, voire à la marginalité, le PCI opposera un refus total aux instances portées par ces mêmes groupes, en lançant les mots d’ordre d’une « nouvelle » éthique du travail et de l’étude (voire d’une stigmatisation bigote des chômeurs, des précaires et, bien entendu, des jeunes militants) et en se proposant comme acteur direct de la répression par son appareil d’encadrement des classes travailleuses, en agissant comme une sorte de police parallèle à côté des forces de l’ordre.
Le rôle joué par le PCI lors de la « période de l’état d’exception » sera donc celui d’un outil implacable de la répression étatique ; dans leur ensemble, ces choix auront par conséquence rien de moins que la fin du mouvement ouvrier italien au début des années 1980, et le déclin sans retour de la gauche en Italie.



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