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USA 1960's | Urbanisme Underground | Architectures Alternatives






« Nous sommes à l'aube d'une révolution qui sera différente de celles du passé parce qu'elle sera faite par la culture et par l'individu ; elle ne changera la structure politique qu'en dernier ressort. Elle n'aura pas besoin de la violence pour réussir et on ne pourra pas, avec succès, lui résister par la violence. »


Charles Reich, professeur de Droit à l'université de Yale.
(The Greening of America, 1970).





Les conquêtes simultanées de nouveaux territoires jamais explorés, pour la seule année 1969, effectuées par les ou aux États-Unis, stupéfièrent son peuple et le monde entier ; sans doute, la plus spectaculaire aura été la conquête spatiale concrétisée le 21 juillet avec les premiers pas d’humains sur la Lune ; peu après, le 15 août débutait le festival de Woodstock ayant réuni 500.000 spectateurs-acteurs, un évènement inédit, et un des espaces symboliques – et aussitôt mythiques - de représentation de force de la contre-culture rebelle, où à peu près toutes les valeurs de l’Amérique bien pensante conservatrice étaient bafouées publiquement : Sex, Drugs and Rock’n Roll servaient la propagande anti-militaire et anti-raciste ; un autre espace s’ouvre également à l’Humanité, immatériel et plus confidentiel mais à la portée tout aussi exceptionnelle : le réseau informatique avec la naissance le 29 octobre, d’Arpanet (Advanced Research Projects Agency Network), ancêtre d’internet et des communautés virtuelles.

Ces trois événements – Apollo (technique), Arpanet (communication), Woodstock (contre-culture)[1] – symbolisent la fin d’une longue époque emprunte de passéisme, et marquent la transition avec un Nouveau monde entièrement tourné vers un futur encore incertain, interrogeant les avenirs possibles, souhaitables de l’Humanité, et donc, naturellement, leurs caractères utopiques, futurs radieux ou irradiés, consacrés en particulier par les architectes visionnaires ou sceptiques des avant-gardes, inspirés par à la fois les nouvelles technologies et les aspirations du monde contre-culturel et de sa propre utopie, concrétisées bien avant l’année 1969, et elles-aussi, ayant interrogées ou scandalisées les Américains ; 1969, première année également de la présidence de Nixon, bien décidé à éradiquer la moindre contestation .[2]

TAHITI | Papeete

 



Tahiti | Papeete
l.u.i. 2020


« Une chose est évidente, il n’y a rien dans ces entassements de béton qui relie l’architecture de cette ville (Papeete) à une quelconque culture particulière. Ces mêmes immeubles lépreux se retrouvent dans toutes les villes ouvrières déshéritées du monde occidental. Ce qui reste à la fin de cette courte promenade, c’est que Papeete est une ville sans âme, bruyante, sale et délabrée. Un peu comme une cité qui est lentement en train de mourir.»
Julien Gué 
To'ere
juillet 2005


Les (rarissimes) études, rapports émanant des services concernés de Polynésie et des technocrates de la Métropole, s'accordent à estimer que la population [1] à Tahiti vivant sous le seuil de pauvreté s'élève à 25 % ; estimation indécente contestée par les observateurs de la chose qui affirment une réalité plus proche des 50 %, chiffre devant être augmenté par les effets dévastateurs de la pandémie, ayant en particulier ravagé les emplois associés aux activités touristiques, principales richesses des archipels.

Mais la pandémie ne peut expliquer une situation - dramatique - d'aussi grande pauvreté, elle l'exacerbe ; la Polynésie française est en effet dotée de dispositifs fiscaux spécifiques, ayant pour conséquence le renforcement des inégalités sociales : ici, au Paradis, les aides et protections sociales accordées aux plus vulnérables et indigents mais aussi aux salariés n'existent pas, les allocations chômage, de logement, le revenu de solidarité active, etc., ces formes d'assistanat promptes à ruiner le Pays et l'ardeur des travailleurs, dit-on. A l'inverse, l’absence d’impôt sur le revenu des personnes physiques, y compris aisées, et de frais de succession en cas d'héritage grèvent le budget du Pays, compensé par des taxes douanières et indirectes, qui elles pèsent très lourdement sur celui des ménages, en particulier des plus modestes. 

D'autre part, les élites gouvernantes de Polynésie ne se sont pas privé, pendant des décennies, et dans une moindre mesure, aujourd'hui, à abuser de leurs pouvoirs afin de s'enrichir en puisant allègrement dans les aides financières offertes par les gouvernements de France, à les utiliser pour asseoir au mieux leur clientélisme, à régner.
 [2] Ainsi, selon Julien Gué [3], habitant à Tahiti, ancien journaliste de l'hebdomadaire Toere, interrogé en 2020 :
« Donc c'est cela la Polynésie, plus de la moitié de la population sous le seuil de pauvreté, c'est une élite locale qui détourne les fonds publics en toute impunité. Et rien n'est fait d'un point de vue sociale, sociétale, rien n'est fait pour l'avancée du pays.»  
Les incidences et conséquences urbaines et architecturales, et environnementales dans le Grand Papeete [4] sont à la mesure des inégalités sociales qui régissent le Pays : l'urbanisation rapide de l'agglomération dans les années 1960 s'est effectuée sans plan d'urbanisme d'ensemble, ou même communal, sinon des schémas prêtant à de multiples interprétations, sans contraintes architecturales, sinon celle de la hauteur des constructions ; une modernisation placée sous l'égide du laisser-faire, des dérogations, d'un laxisme des plus hautes autorités locale et de Paris, et sans aucun doute, de l'incompétence extravagante et notoire des administrateurs et ingénieurs, débarqués de la métropole, et n'ayant aucune connaissance de la société "indigène", qu'il s'agit de moderniser ; certes, malgré de temps à autres de grandes déclarations d'intention et, parfois, des tentatives devant ordonner les désordres, toutes vaines, ou bien sans grande portée face à la machine spéculative et celle technocratique.